Centre Hospitalier Universitaire - RABAT
____________________________________
Maitrise d’ouvrage - DEP
(Direction de l’Equipement Public)
____________________________________
Surface - 6 ha
____________________________________
Montant travaux - 20 M Dirhams
____________________________________
Equipe - GROUPE 3
(Skander AMINE et Omar TIJANI)
____________________________________
Etudes - 2015
____________________________________
Réalisation -
____________________________________
Crédit photo -
____________________________________
Un équipement de la ceinture verte - Le bois périphérique
Anticipant les évolutions rapides de la ville, JCN Forestier propose de reprendre pour Rabat le modèle du plan d’extension d’Adelaide qu’il a proposé comme modèle idéal dans « Grandes Villes et systèmes de parcs ». Forestier appuie ce choix par le fait que la ville est composée de deux noyaux urbains (Rabat et Salé). Il imagine donc de poursuivre un développement par noyaux urbains, ceinturés de « zones vertes d’isolement » de profondeur moyenne de 500 à 1000m ou seraient situés les espaces libres, les jardins botaniques, les pépinières, les écoles d’horticulture, les équipements sportifs,…
La prévision de pépinières pour pourvoir à la plantation et à l’entretien des jardins publics et promenades est un héritage haussmannien. En effet dans ces mémoires, le préfet souligne l’importance de tels équipements pour la gestion de ces espaces et justifie leur création qu’il impose. Il en est de même pour les champs de course ou de polo, les jardins botaniques et les écoles d’horticulture (cf. les transformations du Bois de Vincennes).
Le plan Prost prévoit ainsi la mise en place d’une ceinture verte reliant le quartier de l’Agdal à l’enceinte du Palais Royal vers le Chellah. Forestier suggère de prévoir dans cette ceinture verte, un boulevard promenade (parkway) de tour de ville d’une largeur de 100 à 130m (l’équivalent de l’avenue Foch à Paris) afin de relier le quartier de l’Agdal à l’enceinte du Palais et la porte de Zaers. Ce boulevard comprendrait des bandes de jardins et de plantations de part et d’autre de son emprise viaire, prévues afin de permettre l’élargissement futur des chaussées.
Aujourd’hui ce boulevard est en majeure partie réalisé et a été prolongé du quartier de l’Agdal vers le nouveau quartier de Hay Riad. On peut alors considérer que la ceinture verte se prolonge désormais vers le sud jusqu’à Hay Riad et que l’hopital Avicenne est un de ses équipements phares. On notera que bon nombre de grands équipements de la ville ont été implantés en bordure de ce prolongement de boulevard (hippodrome, campus universitaire, nouveau quartier administratif,…) et complètent magistralement par leurs emprises plantées généreuses ce parkway.
Une typologie de parc caractéristique de Rabat - Les parcs panoramiques
Reprenant les recommandations de JCN Forestier sur la protection des grands panoramas vers la mer et vers l’estuaire de l’oued, H. Prost prévoit l’installation des parcs de Rabat suivant une typologie de belvédère :
-
le parc du Triangle de vue met en relation la ville européenne avec l’océan tout en mettant en valeur l’enceinte de la Médina
-
le jardin de la Résidence Générale ouvre les vues depuis le bureau de Lyautey sur l’estuaire
-
le jardin du Belvédère et son prolongement dans le jardin d’Essai libère les vues vers le grand paysage
Une logique d'implantation et d'adduction - Une rupture de pente
Dans l’incapacité d’utiliser les eaux proches du fleuve largement envahies par la marée, et en raison de l’insuffisance de la nappe phréatique locale, il fallut aller chercher l’eau indispensable au-delà de la ville. D’un côté on entreprit, au nord et à l’est de Salé, le captage de plusieurs sources (Ras al Aïn, Aïn al Khadra,…) ainsi que l’exploitation de la très importante nappe du Gharb à Fouarate ; de l’autre, on procéda au réaménagement de l’ancienne conduite de Aïn Atig, source se trouvant à une quinzaine de kilomètres au sud ouest de Rabat.
L’hippodrome de Souissi, espace vert et grand consommateur d’eau, est alors implanté au plus près de la conduite de Aïn Atig. Cette conduite, qui longe le site côté sud est sur la ligne de crête, souligne la ligne de rupture de pente entre le plateau de Souissi et le plan incliné de l’Agdal. On peut alors imaginer que la ceinture verte est installée le long de cette rupture de pente avec d’un côté les quartiers les plus denses sur les terrains les plus rocheux (quartiers Agdal, Palais Royal, Trois Figuiers) et de l’autre la cité jardin (quartier de Souissi) sur les terres arables du plateau.
Un équipement phare de la cité
A l’image des hôpitaux de Casablanca formant un parc en plein cœur de la cité, l’hôpital Avicenne s’installe en équipement phare du quartier, implanté en pleine ceinture verte et en situation de surplomb sur la ville. Ce site singulier permet à la fois d’être de nos jours en plein cœur de la ville, à mi chemin du centre ancien et de Hay Riad, tout en bénéficiant d’une vue imprenable sur l’océan.
Un milieu singulier - Les reliques de la forêt de la Maamora
Le site occupe l’aire d’installation septentrionale de la suberaie, forêt de chêne-liège (Quercus suber) survivante des époques humides de l’ère quaternaire et tertiaire, dont la Maamora constitue le plus grand reliquat de forêt d’un seul tenant du monde. La pression anthropique (le surpâturage, le gaulage, l’émondage, les coupes de carbonisations, l’urbanisation) a complètement bouleversé son équilibre écologique. Le manque de régénération naturelle, la simplification de l’écosystème suite au recul du sous-bois qui fait partie de l’architecture forestière, les blessures survenues au cours des opérations de récolte de liège, ont affaibli les arbres.
Dans les clairières apparaissent des matorrals (garrigue, milieu composé d’herbacées et d’arbustes) de dégradation qui sont dominés par les Cistacées et les Ericacées.
L’un des traits écologiques fondamentaux de cette forêt est qu’elle est parsemée de dayas. Les dayas sont des mares d’eau éphémères, petites dépressions au fond argileux qui collectent les eaux de pluie et se retrouvent généralement sèches durant l’été. Ces espaces saturés d’eau abritent des phytocénoses composées d’hygrophiles ou même d’hydrophytes, de petits et de grands gazons amphibies, de fougères aquatiques, tous types de végétation d’eau douce très intéressants. Les dayas représentent aussi au cœur de la forêt de chênaie-liège l’habitat d’un dense microcosme composé de formes aquatiques de Coléoptères et d’Hétéroptères, d’Annélides achètes (sangsues), de Crustacés et de Mollusques (Planorbes et Limnées parmi les Gastéropodes, ainsi que certains Lamellibranches). C’est un milieu irremplaçable pour la reproduction et le développement des premiers stades de certains Invertébrés (notamment les Odonates) et le vivier naturel d’Amphibiens (tels le Pleurodèle de Waltl, le Pélobate marocain et les Bufonidae) et de Reptiles (Tortues Emydidae).
Ce sont des zones aquatiques d’importance capitale au regard de la diversité de l’avifaune, toutes des escales essentielles car très proches du passage obligé que représente le Détroit de Gibraltar sur la route des migrations. Le Hibou du Cap y possède ses quartiers et c’est aussi une étape très appréciée sur la voie des zones sahéliennes.
LES PRINCIPES DU PROJET
-
mettre en exergue la continuité de la ceinture verte
-
libérer les vues sur l’océan
-
densifier la lisière habitée
-
mettre en valeur l’histoire du parcellaire et du réseau d’adduction d’eau de la ville
L'horizon végétal - La lisière habitée
Reprenant la typologie végétale de la forêt de la Maamora, une forêt sclérophylle (forêt méditerranéenne) composée de Chênes liège et de Pins d’Alep s’installe sur le parc de l’hôpital. Implanté sur la légère déclivité côté Nord, les bâtiments seront noyés dans une nappe arborée tout en permettant de large ouverture de vue sur l’horizon et l’océan.
La nappe arborée de 10 à 15m de hauteur, constituée essentiellement de Chênes liège (Quercus suber) et de Pins d’Alep (Pinus halepensis), fragmentée en bosquets, ombrera efficacement les aires de stationnement tout en les masquant à la vue depuis l’hôpital. Ces aires de stationnement sont composées de bandes de circulation en béton et de zones de stationnement en stabilisé permettant de minimiser l’imperméabilisation du site et d’optimiser la percolation en place des eaux pluviales.
L'horizon minéral – Une plaque inclinée
Edifié dans la lisière, les bâtiments s’installent sur un socle commun, retranscription d’un affleurement rocheux émergeant au niveau de la rupture de pente du site. Cette grande plaque, « affleurement rocheux », se prolonge naturellement par un parvis incliné qui constitue une vaste place desservant l’ensemble du site tout en mettant en perspective les bâtiments. Elle est à la fois parvis d’entrée, lieu de promenade et belvédère sur la ville et l’océan.
Le promeneur est alors en position confortable en surplomb de la piste (niveau 61.00 NGM) et son champ de vision est libre du côté champ de course comme du côté esplanade seuil d’entrée. Cette plaque place largement perforée au niveau des écuries et de la tribune s’immisce sur l’esplanade parking et devient la place d’entrée du site. Le sol est réalisé en large bande de béton grenaillée avec insert de pierre. Ces plaques-bandes de béton se chevauchent légèrement et donne l’impression d’une stratification du sol reprenant le thème des plaques et de leur tectonique.
Le végétal s’introduit dans les anfractuosités de la plaque par une contamination de jardins en légers reliefs ou en creux permettant d’aérer naturellement le parking tout en amenant de la lumière naturelle. Ces aires plantées de verger d’agrumes (Citrus aurantium et autres) participent à intimiser certains espaces tout en leur donnant un caractère très « rabati » de jardin de riad. De plus, ces parterres constituent une transition entre le plateau de Souissi et l’Agdal, tout deux historiquement planté de vergers d’agrumes.
Cette plaque constitue le lieu de « fracture » entre l’horizon rocheux et l’horizon végétal du site.
L'horizon aqueux – L'eau en pente douce
Reprenant le thème de l’histoire de l’irrigation du site et des dayas de ce territoire, un bassin s’installe dans la déclivité du parvis. A la fois, retranscription de l’ancienne réserve, existante sur le site et réaménagée en piscine, et retranscription des fontaines des riads, ce bassin incliné donne à voir l’élément aqueux sous un autre angle.
Profitant de l’inclinaison du parvis, le bassin magnifie la quête de l’horizontale en donnant à voir une eau inclinée. En effet, à l’image de la fontaine Médicis dans le jardin du Luxembourg à Paris, le visiteur est surpris par la sensation d’avoir affaire à une eau inclinée, effet d’optique du aux bords du bassin qui se relèvent. La présence de l’eau est alors accentuée par ce jeu subtil de perspective.